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Maïa, sage femme
22 juillet 2017

Post partum

Ce matin, je suis tombée sur une BD postée par une copine, un peu perdue de vue, qui a eu un pitchoun récemment. Cette BD que voici, illustre les difficultés des jeunes mères à la suite de leur accouchement et pendant leur congé maternité. Elle est plutôt rigolote et dessine parfaitement un certain nombre de situations auxquelles seront confrontées la majorité des mamans.

Et cette BD m'a attristé fortement. Non pas parce qu'elle me parait fausse ! Mais parce qu'elle me parait tristement vraie... Et qu'elle illustre tous les points à améliorer, qui contibuent à rendre si difficile cette période déjà pas simple au départ et qui pourraient être évités.

Autant certaines vignettes sont la représentation de choses qui sont, et seront toujours, comme la découverte du corps d'après accouchement, et des fameuses "culottes filet avec couches"... Pour le moment, aucune nouveauté ne se présente à l'horizon pour changer cela !

Mais le reste montre, en vrac, une absence d'accompagnement à la maternité, un travail à la chaine des professionnels, une profonde solitude de la maman face à son enfant, des conseils bidons compliquant la vie, les moments border où elle comprend comment on peut en arriver à secouer son bébé, et la comparaison du post partum à de la torture...

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Il y a une vignette qui parle de l'excuse des hormones et de ce qu'elle appelle "post partum" qui correspond au baby blues (NB : le post partum est la période après la naissance d'un bébé, mais ne correspond pas à un état particulier. Parfois, par excès de langage, il est utilisé pour baby blues. Mais pas toujours donc la phrase "elle est dans le post partum" veut le plus souvent dire "elle a accouché il y a peu" et non pas "elle pleure tout le temps"...). Je ne m'attarderai pas sur l'utilisation de l'excuse des hormones pour expliquer tout ce qu'une femme peut ressentir, je l'ai déjà fait dans mon billet foutues hormones !. C'est dégradant, humiliant et en négation du ressenti. 

En revanche, je rebondis sur une phrase qu'elle a écrit sur cette vignette : "ça en fait un état "normal" avec une explication scientifique", comme si le fait qu'il y ait une explication suffise. Fondamentalement, l'état d'hypersensibilté d'une jeune mère est normal, même sans guillemets ! Mais est ce que normal implique qu'on ne peut rien y faire ? Non, non et non ! Par exemple, c'est normal d'être traumatisé après une agression, et pourtant il est fortement conseillé d'avoir un accompagnement pour pouvoir avancer. Donc c'est normal d'être hypersensible après une naissance, il est donc fortement conseillé d'être bien entouré pour pouvoir avancer dans ce chemin. Le truc cool dans le fait que ce soit normal est qu'on peut s'y préparer et prendre les mesures nécessaire pour que ce normal encombrant passe mieux. Parce que ce soit normal ou pas, tout ce qu'on peut faire pour faciliter cette période va faire que les mamans se sentent mieux, non ?

Et ensuite, elle fait une comparaison avec les organisations des pays autour de la France (et j'avoue qu'à mon sens, la palme du pays pour faciliter cette période vient aux Pays Bas avec leurs kraamzorg pendant les 10 jours qui suivent la naissance. Une personne, formée à la puériculture, qui vient à la maison s'occuper de tout ce que veut la maman, pour lui permettre faciliter le quotidien, en plus de lui fournir les conseils dans l'apprentissage de son petit...). Et c'est vrai qu'en France, on est grave à la ramasse ! Mais surtout à la ramasse par rapport à la connaissance des choses qui existent !!! Elle parle de l'accompagnement en Allemagne par une sage-femme : c'est possible en France !!! Alors pour être honnête, on ne vient pas quotidiennement. Les visites sont à la discrétion de la sage femme et des patientes. Par exemple, je décide, avec la patiente, à chaque visite, de ce que nous pensons nécessaire pour une prochaine visite. Certaines ont besoin de beaucoup de soutien, d'autre de moins. Certaines auront besoin que je passe plusieurs semaines, d'autres non. Bref, nous nous adaptons au besoin.

Alors, il est vrai que cette possibilité est un peu plus connue depuis 3 ans avec le programme organisé par la sécu mais il n'est pas en place dans toutes les maternités et je vois encore une certain nombre de mamans à distance de l'accouchement qui n'ont pas été au courant de ce genre de soutien. L'information n'est pas suffisamment diffusée !!! 

Par aillleurs, en préparation à l'accouchement et à la parentalité, il devrait être, à mon sens, fondamental de parler de cette période si spéciale et potentiellement si à risque. Expliquer pourquoi une jeune maman est fragile et forte à la fois, comment faire pour diminuer les situations à risque, savoir s'entourer de gens qui nous font du bien, savoir demander de l'aide parce qu'on n'est pas wonder woman, expliquer aux papas cette période : comment aider leurs femmes même s'ils ne les comprennent pas, comprendre pourquoi quand ils rentrent le soir elles ne rêvent que de leur donner le petit monstre et que non, elles n'ont pas "rien fait" parce que s'occuper d'un bébé n'est peut être ni hautement intellectuel, ni rémunérateur mais ça use à la corde en fait...

Bref, nous, "professionnels", avons un rôle majeur de transmission ! Ce qu'avant faisaient le groupe de femmes qui entouraient une future maman et une jeune maman. Transmission des difficultés et des solutions possibles, bienveillance et mise en valeur de ce que les mamans font bien (en vrai, la majorité des choses bien sur !)

Mais aussi nous, "femmes", "amies", "proches", avons également un rôle de transmission et de soutien !!!! Au lieu de raconter les histoire terribles d'accouchement, de bébé qui ne dorment pas, de traumatisme violent, ne pouvons nous pas faire part des solutions aux difficultés que nous avons rencontrées ? Ne pouvons nous pas apporter l'aide que nous aurions aimé avoir et que nous n'avons peut être pas reçu ? Je ne dis pas de cacher les difficultés (bon, choisir celles que l'on raconte me parait plutôt avisé quand même...), je dis de ne pas s'arrêter à ça, de continuer la transmission à ce qui fait que ça va mieux ! et de proposer notre aide.

Certaines de mes patientes viennent de pays étrangers, où la culture du groupe est encore très présente. Et elles sont surprises par la solitude et les difficultés des jeunes mamans en France. A nous de reconstruire notre groupe ! 

A vous, futures mamans, pensez y avant votre accouchement. Qui pour m'aider, qui pour me faire rire, qui pour me confier ? Y a-t-il des cafés poussettes ou des associations autour de la parentalité à proximité ? Rencontrer une sage femme libérale ? 

Et ça pourra devenir ce que c'est sensé être : une période pleine de challenges, certes, mais aussi de beauté...

 

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